Motion du C.N.R.

MOTION DU CONSEIL NATIONAL DE LA RESISTANCE

lors de sa première réunion à Paris le 27 mai 1943.

 

Conseil de la Résistance:

Motion votée à l'unanimité au cours de la séance tenue quelque part en France le 25 mai 1943.

 

            Le Conseil de la Résistance, réuni quelque part en France occupée le 25 mai 1943, constate avec une joie immense la libération totale de l'Afrique du Nord, par la victoire des armées Alliées,  Anglaises, Américaines et Françaises.

            Cette victoire, venant après les magnifiques succès remportés par l'armée de l'Union Soviétique, apporte aux Français qui luttent sur le sol national une grande espérance. Le Conseil s'incline avec piété devant tous ceux qui sont tombés. Il félicite et il remercie les  combattants et leurs chefs. Il dit son admiration à tous. Il adresse une pensée particulière de reconnaissance et d'affection à ceux qui ont vaincu sous le drapeau de France. Il se réjouit que le grand effort africain esquissé depuis le mois de juin 1940, poursuivi dès la rentrée en guerre de l'AEF, développé en 1941 et 1942 grâce a la participation des forces de la France Combattante aux campagnes de Cyrénaîque, grâce aux exploits de la colonne Leclerc, ait été parachevé aujourd'hui par la jeune armée du général Giraud.

            Le Conseil salue avec une vive satisfaction la décision prise au lendemain de cette victoire, par le général de Gaulle et le général Giraud, de se rencontrer très prochainement à Alger pour réaliser l’unité de toutes les forces françaises dressées contre l'ennemi de la Patrie et ses complices du dedans.

            En cette heure solennelle de l'histoire de notre pays et au moment où va se fixer son destin, le Conseil doit exprimer l’opinion du peuple, qui lutte sur le sol de la métropole encore occupée, sur les conditions dans lesquelles il convient de consacrer cette unité.

            La France, déjà présente sur tous les fronts, aspire à rentrer plus intensément encore dans la guerre libératrice et à y jeter toutes les ressources de son Empire libéré. Pour atteindre pleinement son but, il faut qu'elle ait, au plus tôt, un gouvernement unique et fort qui coordonne et qui ordonne, affirmant aux yeux du monde son prestige retrouvé de grande nation.

            Le Conseil considère comme inadéquate l'institution à cet effet d'un simple Comité Exécutif, surtout s'il devait comporter une dualité de direction incompatible avec les nécessités de la guerre et l'ampleur de sa mission.

            La France ne peut concevoir que la création d'un véritable gouvernement provisoire, certes, mais ayant toutes les formes et toute l'autorité, répudiant une fois pour toutes, officiellement et dans les faits, la dictature de Vichy, ses hommes, ses symboles, ses prolongements. Elle entend que ce gouvernement - c'est le devoir du Conseil de l'affirmer avec netteté – soit confié au général de Gaulle qui fut l'âme de la Résistance aux jours les plus sombres et qui n'a cessé depuis le 18 juin 1940 de préparer en pleine lucidité et en pleine indépendance la renaissance de la Patrie détruite comme des libertés républicaines déchirées.

            Elle souhaite ardemment que le général Giraud, qui a préparé et assuré avec les Alliés la victoire en Afrique du Nord, prenne le commandement de l'Armée Française ressuscitée. Ainsi seront réalisées, techniquement et moralement, les conditions nécessaires à l'unité de toutes les forces françaises combattantes, instrument indispensable de la libération et de la résurrection de notre pays.

            Le Conseil tient à proclamer aujourd'hui la nécessité de cette solution conforme à la volonté de la France.

            Il tient pour assuré que cette volonté parfaitement claire sera traduite sans délai et sans mutilation, comme l'exigent, au nom de la France, tant de sacrifices obscurs et tant de sang répandu.

 

            Ont signé la présente motion les représentants de :

 

Ceux de la Libération

Ceux de la Résistance

Front National

Libération-zone Nord

OCM

Combat

Franc-Tireur

Libération-zone Sud

Parti communiste

Parti socialiste

Parti radical-socialiste

Parti démocrate populaire

Alliance démocratique

Fédération républicaine.